La coupe du monde de football 2018 en Russie est l’occasion de découvrir Rostov sur le Don, une ville de plus d’un million d’habitants en compétition avec Krasnodar pour le titre de capitale de la Russie du Sud. A Krasnodar le premier Imax, à Rostov le premier Starbucks … Là, avantage incontestable à Rostov sur le Don, avec le stade Rostov Arena qui accueillera 43.700 spectateurs lors de la coupe du monde, dont des touristes qui découvriront la ville des Cosaques du Sud. Parce qu’il y a autant de cosaques possibles que de zones entre la Mer Noire et la Sibérie qui donnent leurs noms à des groupes de cosaques : Oussouri, Kouban, Terek et donc Cosaques du Don. Certains auront été fidèles au tsar, d’autres l’auront combattu … C’est très facile à comprendre : le nom de cosaque vient du mot turc Qazak qui signifie « homme libre ».
Donc inutile de faire rentrer un cosaque dans une case bien déterminée : il y a cette blague que raconte Matthieu Buge dans son livre remarquable « le cauchemar russe – abécédaire de clichés et fantasmes occidentaux » paru aux éditions L’Inventaire : sur un pont au-dessus d’un cours d’eau, 2 amis parlent de l’éloquence. L’un prétend qu’avec ses talents de persuasion, il arrivera à convaincre n’importe qui de se jeter du haut du pont dans le fleuve en dessous. Le premier passant, un Anglais, se voit abordé ainsi : « Sir, savez-vous que votre entreprise vient de faire faillite ? ». De désespoir, l’Anglais se jette à l’eau. Le second, un Français, est abordé ainsi : « Monsieur, savez-vous que dès que vous avez le dos tourné, votre femme vous trompe ? ». De désespoir, le Français se jette à l’eau. Le 3ème est Russe, probablement Cosaque, ivre bien sûr… « Camarade, attention, ici, une loi interdit de se jeter du pont ». Aussitôt le Russe enjambe le parapet : « Rien à f… ! Voilà pour ta loi ! ». Et il saute dans ce qui ne peut être que le Don avant la Mer d’Azov.
C’est ce tempérament qui a fait comparer autrefois Rostov sur le Don à Chicago, a fait dire à Napoléon Bonaparte : « donnez-moi 20.000 cosaques et je conquiers l’ensemble de l’Europe », ou à fait reculer Hitler qui avait imaginé la conquête du Caucase en s’emparant de la ville. A deux reprises, les troupes nazis sont entrées dans Rostov sur le Don, la seconde, en août 1942 conduisant au massacre de Zmievskaïa Balka qui fit plus de 28.000 victimes, indifféremment hommes, femmes, enfants, fusillés pour la plupart (soit plus que la population actuelle entière de certaines villes françaises comme Sens, Soissons ou Rillieux-la-Pape). Les Nazis repartirent au début de l’année 1943, après leur défaite à Stalingrad, laissant ce sinistre souvenir.
Le Caucase reste mystérieux au point d’être source d’inspiration y compris pour des artistes modernes comme la canadienne Loreena Mc Kennit avec sa chanson night ride across the Caucasus.
Pourtant, à 960 km de Moscou, plein sud, Rostov sur le Don bénéficie de températures moyennes en juillet qui s’échelonnent entre 17 et 30 degrés Celsius, avec une moyenne à 23 (mais une pointe une année jusqu’à 40°) qui rend la vie et le séjour agréables.
La gare ferroviaire permet de relier n’importe quel point de Russie et même d’Ukraine, l’aéroport se trouve à quarante minutes du centre-ville en taxi, la gare fluviale est active – sauf certains étés, lorsque le débit du Don est trop faible – ; quant à la gare routière, elle offre au voyageur plusieurs fois par jour de rejoindre des villes dont le nom est évocateur : Astrakhan, Sébastopol, Odessa, Yalta … Bref, en matière de communications, Rostov sur le Don est un nœud important.
Preuve néanmoins de l’importance des communications, tout voyageur de passage à Rostov sur le Don devra consacrer un peu de temps à la visite du Musée des Chemins de Fer : fondé en 1960 sur le site de la gare de chemin de fer désaffectée de Gnilovskaya, on y admire une quarantaine d’engins et matériels : des locomotives (14 à vapeur dont 2 construites avant-guerre, 7 électriques, 5 diesel), des wagons dont 2 wagons salons. Les visiteurs peuvent même faire une petite promenade qui les ramènera aux temps anciens.
Mais à Rostov sur le Don, on passe du temps sur le marché central – l’influence de l’Arménie et l’amitié avec ce pays (il y a beaucoup d’églises arméniennes à Rostov sur le Don dont plusieurs méritent une visite) font découvrir des mets totalement inhabituels comme la soupe appelée khatch. Mais d’autres points d’intérêts méritent un coup d’œil, à commencer par les entrepôts Paramonov : imaginez de grands bâtiments où l’on entreposait le blé conservé à température idéale grâce à des bassins souterrains d’eau froide alimentés par des sources, mais abandonnés depuis plus d’un siècle. Les habitants de Rostov sur le Don, toujours aux racines cosaques, n’ont pas été longs à comprendre qu’il était possible de transformer ces vieux bâtiments en piscine gratuite où l’on vient chercher la fraîcheur des sources durant les périodes d’été, en attendant la concrétisation de la transformation de l’endroit en hôtel de luxe avec spa.
L’une des personnalités marquantes de la Russie et qui était un habitué de Rostov sur le Don, a été le grand poète Alexandre Pouchkine. A défaut d’aller dans un café boire un chocolat chaud, il faudra parcourir avec sa guide ou son guide l’avenue Pushkinskaya, bordée d’arbres et de lilas séparant la route des vieux manoirs qui la caractérisent, et de s’arrêter devant les œuvres publiques présentant la vie de l’écrivain et des scènes de son roman Eugène Onéguine.
Aujourd’hui Rostov sur le Don est une ville active, qui va de l’avant, avec pléthore de restaurants, de lieux branchés. Résolument tournée vers l’avenir, elle est en 3ème position du classement des villes russes où il est le plus agréable de vivre : présentée comme la porte du sud de la Russie, nœud de transport administratif et économique, Rostov sur le Don dispose d’atouts majeurs qui favorisent le développement dynamique des entreprises, avec comme principal point fort une capacité à s’adapter à une situation en constante évolution sans se renier.
Aller à Rostov sur le Don c’est faire connaissance avec une autre Russie, bien différente de Moscou ou de Saint Pétersbourg : porte du Caucase, proche de la Mer d’Azov donc de l’Ukraine et de la Crimée, ancienne terre des Scythes, soutien de l’Arménie, ici se mêlent traditions, innovations, cultures grecques, slaves, … Une complexité culturelle a aborder doucement, soit en complément d’une croisière fluviale jusqu’à Astrakhan soit après une découverte de la Crimée toute proche et tout aussi complexe, si elle redevient possible.
Sébastien
Sébastien, notre cher collègue est passionné de voyages et d’écriture, il contribue notamment à la communication de Nord Espaces.
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