Par André
Si vos pas de promeneur parisien vous mènent dans le 10ème arrondissement de Paris, à proximité de la gare du Nord, plus précisément rue de Belzunce, vous serez peut-être attiré par une vitrine atypique chargée de vieilles bandes dessinées : la boutique Fantasmask accueille depuis des années des passionnés de revues dessinées d’aventures, de science-fiction ou d’anciens romans policiers.
J’ai eu la surprise d’y découvrir un livre au format classique d’une bande dessinée, publié aux Editions de la Hulotte, intitulé Les aventures de Tintin – Tintin en Alaska et sur les Pôles, avec une couverture originale sur laquelle figurent, dans un paysage nordique stylisé avec un minimum d’arbres, une cabane de trappeur au toit enneigé, un igloo, un traîneau entraîné sur la neige par des chiens attelés en ligne à la façon scandinave (et non à la façon inuit en éventail) rappelant un dessin vu dans une œuvre d’Hergé, un Tintin chaudement vêtu et son inséparable Milou, lui aussi protégé du froid. En 4ème de couverture, une carte de l’Antarctique, les noms des explorateurs Scott et Amundsen, le dessin d’un hydravion ou avion à patins, quasi analogue à celui photographié par Nord Espaces en Alaska – celui photographié en été par Nord Espaces étant rouge, mais l’esprit est le même -, Tintin, le Capitaine Haddock et le Yeti immortalisé dans Tintin au Tibet.
Vous vous en doutez, il n’en fallait pas plus pour que je me plonge dans ce livre, apprenant à cette occasion de nombreuses anecdotes. Je suis heureux d’en partager quelques-unes avec les fidèles du blog de Nord Espaces : en fait le livre n’est pas une bande dessinée inédite, une aventure de Tintin en Alaska, au Groenland ou au pôle Nord à côté de laquelle je serais passé, mais une étude sur la fascination qu’ont exercé sur Hergé ces territoires extrêmes, ainsi que la présentation d’esquisses ou de dessins qui confirment l’idée de l’auteur d’envoyer le reporter et son chien dans les territoires du Grand Nord.
Documents à l’appui, les premières pages précisent que dès 1937, Hergé envisageait pour Tintin et Milou une aventure en Alaska, inspirée des récits de Jack London comme « L’Appel de la forêt » ou « Croc Blanc » : Pierre Assouline, Philippe Goddin ou encore Thierry Smolderen le confirment dans leurs biographies d’Hergé, précisant que celui-ci hésitait entre l’Alaska et le Groenland comme cadre à des scènes qui auraient vu Tintin dériver sur un iceberg, être secouru par un avion à patins, découvrir d’immenses chutes d’eau… Mais c’est Le Sceptre d’Ottokar se déroulant dans le pays imaginaire de Syldavie qui a la préférence des éditeurs.
Hergé ne renonce pas pour autant à illustrer le Grand Nord. Il publie en 1938 les aventures de deux enfants (et de leur singe apprivoisé particulièrement intelligent) que le hasard d’une aventure emmène par-dessus l’Islande jusqu’au nord du Groenland ; c’est dans cette œuvre que l’on trouve le dessin du traîneau attelé à la scandinave, repris sur la couverture de Tintin en Alaska et sur les Pôles. L’aventure de Jo, Zette et Jocko Destination New York est donc l’occasion pour Hergé de reprendre quelques idées initialement prévues pour Tintin, même si l’on note la présence pour le moins incongrue de manchots au Groenland.
Cette fascination des terres polaires exercée sur Hergé est l’occasion d’un petit clin d’œil malicieux à la marque Espaces Andins développée par Nord Espaces : lorsque les bateaux norvégiens d’Hurtigruten ont décidé de lancer des croisières d’exploration en Antarctique, Nord Espaces les a proposées à ses clients et amis, tout en offrant la possibilité de partir à la découverte des glaciers de Patagonie, des fjords du Chili et bientôt de toute l’Amérique du Sud. De façon significative, dans Le Temple du Soleil qui se déroule essentiellement au Pérou (qu’Espaces Andins connaît particulièrement bien), on voit les détectives Dupond et Dupont au… pôle Sud, aux côtés de manchots, cherchant à l’aide du pendule du Professeur Tournesol la solution d’un mystère.
La fascination d’Hergé pour les terres arctiques se concrétise aussi en 1942 avec la parution de L’Etoile Mystérieuse, 10e album de la série Les Aventures de Tintin, et la réalisation de cartes postales pour Noël et le Nouvel An. 6 cartes (sur les 25 réalisées) sont reproduites dans Tintin en Alaska, certaines faisant sourire les experts des terres arctiques chez Nord Espaces, par exemple celle de Tintin apparaissant à l’entrée d’un igloo doté d’une cheminée, avec en arrière-plan des manchots.
A propos de manchot, j’ai appris grâce à ce livre que l’un d’eux, ramené à Ostende en 1959 par le navire scientifique Polarhav sous les applaudissements de 60 000 Belges, dont le roi Baudouin, avait été « naturalisé Belge ». Cette expédition en Antarctique, à l’emblème dessiné par… Hergé, était menée par Gaston de Gerlache, 60 ans après l’expédition australe de son propre père Adrien, sur un trois-mâts.
Le dynamisme de la Belgique à l’égard des terres polaires n’est pas que littéraire : de nombreuses expéditions scientifiques prouvent l’esprit d’aventure de nos voisins, qui s’est poursuivi bien après l’expédition de Gaston de Gerlache, notamment vers l’Antarctique.
Le livre évoque aussi d’autres expéditions polaires comme celle de Jean Malaurie au Groenland en 1955, ou l’opération Mammouth chez les Dolganes de Sibérie, une zone que Nord Espaces connaît bien aussi – et nous espérons la fin de la crise géopolitique débutée en 2022 pour renouer des contacts avec les éleveurs, les pêcheurs, les scientifiques de Sibérie et du Kamtchatka. Le dernier dessin du livre Tintin en Alaska et sur les Pôles fait référence à la Guerre Froide.
Une page intéressante traite du langage inuit auquel nous avons emprunté des mots devenus courants comme anorak, parka, kayak… Intéressante parce que Tintin aurait été confronté à une culture totalement différente, notamment par ses légendes et son rapport à la nature (les aurores boréales sont par exemple au Groenland le témoignage des âmes des morts).
Les illustrations du livre donnent envie d’aller se confronter à la réalité, en espérant voir ce monde rêvé par Hergé… A défaut de pouvoir lire une aventure de Tintin en Alaska ou au Groenland, on peut vivre sa propre aventure grâce à Nord Espaces, en profitant des conseils de Natacha, Valérie, Julia, Mathilde ou Mélanie, qui peuvent parler des terres du Nord où elles se sont rendu (ou vécu) à plusieurs reprises. Natacha a même organisé un voyage de noces en Alaska dont le couple parle toujours. Pour le Pérou, la Patagonie ou l’Antarctique, Valérie est l’interlocutrice idéale pour construire votre propre aventure. Enfin… Il doit rester un dernier exemplaire du livre Tintin en Alaska et sur les Pôles chez Fantasmask !
André
L’Hiver en Alaska – Rencontres Authentiques en Terre d’Expéditions
Sébastien
Sébastien, notre cher collègue est passionné de voyages et d’écriture, il contribue notamment à la communication de Nord Espaces.
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