Le relief se fait maintenant moins abrupt et la côte plus découpée. A l’Anse-à-Valleau, le site historique de Pointe-à-la-Renommée relate l’histoire de la première station radiomaritime en Amérique du Nord ; son installation par Marconi en 1904 est reconnue Evènement historique national du Canada. Deux expositions font découvrir la vie des opérateurs radio, des gardiens de phares et de leurs familles. Le phare a lui-même voyagé ! Après 20 ans d’exil dans le port de Québec, il est revenu sur son site initial en 1997. Le village de Rivière-au-Renard, à 178 km de Sainte-Anne-des-Monts, est considéré tout simplement comme la « Capitale des pêches » au Québec. Raison sans doute de l’édification du Manoir Le Boutillier, à l’Anse-au-Griffon toute proche. Cette superbe demeure fut construite en 1860 pour John Le Boutillier, politicien et grand marchand de morue.
En 1847, les habitants de Cap-des-Rosiers assistèrent impuissants au naufrage du Carrick, qui causa la perte de plus de 130 immigrants irlandais ; les survivants s’installèrent dans la région. Le phare construit en 1858 est toujours le plus haut du Canada avec ses trente-quatre mètres. Ce site historique offre une vue dégagée sur le parc national Forillon, à la pointe de la Gaspésie. L’aire protégée de 244 km2 est spectaculaire avec les montagnes érodées de l’extrémité nord des Appalaches, des forêts et prairies parsemées de fleurs sauvages, des marais salants, dunes, plages de galets et falaises escarpées.
Forillon abrite une faune très variée, dont l’ours noir, l’orignal et 225 espèces d’oiseaux. La compagnie de pêche Hyman et fils acquit son premier établissement en 1845 à Grande-Grave, aujourd’hui site historique à l’intérieur du parc. Son magasin général et la maison Blanchette rappellent le contrôle omniprésent des deux compagnies pendant plus d’un siècle. C’est là, entre autres, que l’on transformait la morue en produit salé-séché, la fameuse « Gaspé Cured« , pour ensuite l’exporter en Italie, en Espagne et aux Antilles. Le sentier du mont Saint-Alban réserve quant à lui plusieurs points d’observation sur la mer et les falaises où nichent des oiseaux.
De fait, pour apprécier pleinement le parc national Forillon, il ne faut pas s’en tenir aux sentiers mais, à Cap-aux-Os, embarquer pour une croisière en baie de Gaspé. Les eaux qui entourent le parc sont en effet fréquentées par d’importantes colonies de goélands argentés, cormorans, fous de Bassan, petits pingouins et autres oiseaux marins. Ainsi que par plusieurs espèces de phoques et cétacés, dont le rorqual à bosse, le petit rorqual et le dauphin à flancs blancs.
Les 14 500 habitants de Gaspé en font la première ville de Gaspésie. C’est là, en 1534, que Jacques Cartier prit possession au nom de François 1er de ce qui allait devenir le Canada. Le navigateur breton, maître pilote du roi de France, quitta Saint-Malo le 20 avril de cette année avec deux navires et soixante-et-un hommes. Il suivit la route des pêcheurs bretons et basques, qui déjà chassaient la baleine et pêchaient la morue dans l’estuaire du Saint-Laurent. Ainsi, Cartier atteignit Terre-Neuve après seulement vingt jours de mer. « Berceau de l’Amérique française« , Gaspé fut symboliquement fondée en juillet à la pointe O’Hara, où Cartier fit planter une croix de bois. Composé d’une résidence patrimoniale d’origine, de six bâtiments reconstitués et d’une croix de granit monolithique, le site du Berceau du Canada sur la pointe O’Hara propose une évocation du village de Gaspé tel qu’il était en 1900.
De nombreux peuples érigèrent leurs campements sur les rives du Saint-Laurent et à l’embouchure des rivières. Elles leur garantissaient une nourriture abondante et une facilité de déplacement vers l’intérieur des terres, où ils se réfugiaient en hiver pour chasser et attendre le retour de la belle saison. A l’arrivée des premiers colons européens, les Micmacs étaient présents en Gaspésie depuis plus de 2 500 ans. Surnommés les « Indiens de la Mer« , ils furent probablement les premiers à être en contact régulier avec les Européens, peut-être dès le XIe siècle et les premiers établissements vikings en Amérique du Nord. Leur expertise en matière de pêche et de navigation sur des canoës en écorce de bouleau fut très appréciée des premiers explorateurs, pêcheurs et marchands européens. Dans la baie de Gaspé, les Micmacs fondèrent le village de Gespeg, « Fin de la Terre« . Les trois communautés de la Gaspésie valorisent toujours leurs sites ancestraux et la pêche traditionnelle au saumon. Le Site d’interprétation micmac de Gespeg propose aussi un village reconstitué.
Le Musée de la Gaspésie, qui conserve et met en valeur l’histoire et la culture régionales, mérite lui aussi une visite. Pendant la Seconde Guerre mondiale, l’audace des torpilleurs et sous-marins allemands conduisit à la bataille du Saint-Laurent, dont il reste des traces notamment dans la baie de Gaspé. Le Musée de la Gaspésie et le secteur Fort Péninsule du parc national Forillon livrent les secrets de ces hostilités. Les trois belles rivières à saumon arrosant la ville de Gaspé invitent pour leur part à écrire une histoire moins dramatique…
La charmante municipalité de Percé est située à 60 km de Gaspé. Le parc national de l’Île-Bonaventure-et-du-Rocher-Percé se découvre de préférence en bateau.
Le rocher Percé, emblème touristique du Québec, est une véritable muraille longue de plus de 400 m, haute de 85 m à sa pointe extrême et percée d’une arche. Son poids serait de 5 millions de tonnes. Le rocher est relié à la terre ferme par un tombolo émergeant à marée basse. Mais l’accès n’est malheureusement plus permis, car environ 300 tonnes de roche se détachent chaque année ! Possédant une maigre végétation herbeuse sur son sommet en plateau, le rocher est bien sûr le repaire de nombreux oiseaux marins.
L’île Bonaventure, quant à elle, fut l’un des premiers sites de pêche saisonnière en Nouvelle-France. Elle abrite aujourd’hui plus de 280 000 oiseaux, dont la plus importante colonie de fous de Bassan d’Amérique du Nord, qu’il est possible d’approcher de très près sur le plateau. Le patrimoine bâti témoigne de la vie des insulaires au XIXe siècle. Plusieurs compagnies établirent des postes de pêche à Percé, dont la Robin et Le Boutillier Brothers Co. L’île à la flore singulière inspira aussi de nombreux peintres et poètes, dont André Breton.
A l’Anse-à-Beaufils toute proche, le Magasin général historique authentique 1928 transporte le visiteur dans une ambiance originale, celle du magasin général Robin, Jones and Whitman, aux boiseries de chêne chargées de marchandises des temps passés. La vieille usine autrefois dédiée à la transformation du poisson est aujourd’hui un centre culturel et touristique où le premier départ des homardiers, en avril, est toujours un évènement. Le rituel du jour J est empreint d’émotion, les festivités commençant dès 3h00, bien avant l’aube !
A Newport, le Site Mary Travers raconte l’histoire de cette ménagère du Québec, surnommée « La Bolduc« , devenue dans les années 1930 la « Reine des chanteurs folkloriques canadiens« . Mary Travers est l’artiste la plus connue de la turlute, forme québécoise d’expression musicale qui consiste à chanter des onomatopées sur des airs traditionnels de violon.
A suivre…
Sébastien
La Gaspésie, berceau du Canada (1/3) La Côte
La Gaspésie, berceau du Canada (3/3) Chaleurs
Québec, terre des contrastes
Sébastien, notre cher collègue est passionné de voyages et d’écriture, il contribue notamment à la communication de Nord Espaces.
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