Le Vasa, fascinant et tragique navire du Lion du Nord

A Stockholm, le musée Vasa est dédié à l’un des plus célèbres navires de l’histoire. Fascinante histoire que celle du Vasa, à la fois arme et œuvre d’art, monument de prestige et tombeau.

Le Lion d’un Nord en guerre

Troisième roi de la dynastie des Vasa, Gustav II Adolf (1594-1632) accéda au trône de Suède en 1611. Le pays était alors engagé dans pas moins de trois guerres : contre la Russie, le Danemark et la Pologne-Lituanie. Se posant en défenseur du luthérianisme, le Lion du Nord agrandit et organisa le royaume, jetant ainsi les bases de ce qui allait devenir une grande puissance européenne. Cela au prix de 18 années de guerre sur la durée de son règne, dont un engagement dans la guerre de Trente Ans (1618-1648).

Genèse d’un géant des mers

C’est en janvier 1625 que Gustav II Adolf passa commande à un maître charpentier hollandais de quatre navires de guerre, le Vasa devant être rien moins que le plus puissant trois-mâts de la Baltique, voire du monde.

Jusqu’à plus de 400 personnes d’une demi-douzaine de nationalités, parlant différentes langues et utilisant deux systèmes de mesure différents, travaillèrent de concert sur ce navire au chantier naval de Stockholm. Les matières premières venaient de toute l’Europe du Nord. La quille du Vasa fut posée à la fin de l’hiver 1626. Déjà malade au début de la construction, le maître d’œuvre dut transmettre ses responsabilités à son second ; il mourut à peine un an plus tard. Le Vasa fut mis à l’eau au printemps 1627. Des centaines d’artisans travaillèrent encore tout l’été à la finition de la coque et du gréement.

Une œuvre monumentale et létale

Une fois terminé, le Vasa était long de 69 mètres et haut de plus de 50 mètres, de la quille au sommet du mât principal. Equipé de ses dix voiles, 64 canons, 120 tonnes de lest et centaines d’ornements, il pesait plus de 1200 tonnes ! Peintes de couleurs vives avec une utilisation abondante de feuilles d’or, ses sculptures évoquaient la mythologie grecque et romaine, l’Ancien Testament, l’Empire romain, des personnages réels ou fictifs de l’histoire suédoise, des guerriers en armure. Deux nobles polonais étaient visibles depuis les lieux d’aisance… Le navire était également orné de lions, de sirènes, d’anges, de monstres et de diables.

Des mesures réalisées sur une copie exacte de l’un de ses canons montrèrent une portée potentielle de plus de 1000 mètres, la portée de combat réelle étant probablement inférieure à 500 mètres du fait du roulis. Propulsé à une vitesse égale ou supérieure à celle du son, chaque boulet pouvait perforer jusqu’à une épaisseur de 80 cm de chêne massif.

Plus qu’un naufrage, une catastrophe nationale

Au cours de l’été 1628, le capitaine supervisant la construction du Vasa fit part de son inquiétude à son supérieur hiérarchique, un amiral. Il demanda à trente hommes de courir d’avant en arrière sur le pont, ce qui fit rouler le navire de façon inquiétante. L’amiral fit arrêter la démonstration de peur que celui-ci ne coule à quai !

Le Vasa n’en prit pas moins la mer tel quel sous la pression du roi. Son voyage inaugural eut lieu le dimanche 10 août 1628. Des milliers d’habitants de Stockholm étaient massés sur les quais, ainsi que plusieurs ambassadeurs étrangers. L’équipage avait eu l’autorisation d’inviter à bord des proches pour cette première courte traversée. Le géant des mers ne vogua pas plus de 1 300 mètres. Toujours en vue du chantier naval, à 120 mètres seulement du rivage, le Vasa s’inclina à bâbord sous l’effet d’une rafale de vent et l’eau s’engouffra par les sabords laissés ouverts. Quelques minutes plus tard, il gisait sur le fond marin, 32 mètres plus bas, son naufrage faisant 30 victimes, la plupart restés coincés à l’intérieur.

Les mathématiques de la stabilité

L’enquête conclut abusivement à la seule erreur de conception du maître d’œuvre hollandais, opportunément mort depuis plus d’un an. Si celui-ci était respecté dans le métier, le Vasa était nouveau pour lui par sa taille et son armement. Alors que l’on ne connaissait pas encore les modèles mathématiques permettant de prédire la stabilité et la vitesse, tout reposait sur l’expérience des charpentiers navals. Il était alors courant que les grands navires soient dans un premier temps instables. Des méthodes reconnues permettaient de remédier au problème. L’armement pouvait être modifié, des bordages ajoutés à la ligne de flottaison, voire un pont retiré pour rapprocher le centre de gravité du niveau de l’eau. Le Vasa ne flotta pas suffisamment longtemps pour cela. Ah, si les sabords avaient été fermés…

Après 333 ans passés au fond de la mer, le Vasa fut reconstitué avec 98 % de pièces d’origine, ce qui en fait le navire du 17ème siècle le mieux conservé au monde.

Source : vasamuseet.se

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