L’ours est son maître

31 mars 2017
  • Culture & Géo / Alerte TV

Né en 1936 à Kamensk en Russie soviétique, Valentin Pajetnov se passionne dès le plus jeune âge pour la nature et la vie sauvage. Ses héros sont alors Mowgli, Tarzan, Tom Sawyer et Dersou Ouzala. Embauché à 15 ans comme ouvrier, il exerce les métiers de charpentier, soudeur, mécanicien et camionneur. A la suite de ses trois années de service militaire dans l’Extrême-Orient russe, qui lui font découvrir la taïga au bord du Pacifique, il décide de faire de sa passion son métier. En 1959, Valentin Pajetnov s’établit en Sibérie près du fleuve Ienisseï en tant que chasseur professionnel. Il pratique aussi l’exploration en solitaire et la pêche, mais sans assouvir sa soif de connaissance du monde animal. Il décide alors au bout de quelques années de reprendre ses études.

En 1963, il rentre dans sa région natale où, mécanicien-moissonneur dans la journée, il poursuit son instruction secondaire à l’école du soir. Après des études de zoologie à distance, il décroche ainsi un diplôme de biologiste-ingénieur des chasses. C’est en 1972 que Valentin Pajetnov, engagé dans la Réserve naturelle de la Forêt centrale (région de Tver), fait la rencontre décisive d’un éminent éthologiste, le professeur Krouchinski. Celui-ci l’encourage à se lancer dans l’étude de terrain de l’ours brun, précisément l’accompagnement des oursons orphelins en se substituant à leur mère, dans des conditions aussi proches que possible de la vie sauvage. Valentin Pajetnov a trouvé sa voie.

Au point qu’il s’installe en 1985 avec sa famille dans un village abandonné du plateau du Valdaï, aux sources de la Volga. Boubonitsy est perdu dans une forêt de tilleuls, érables, bouleaux, trembles et sorbiers, où les ours se gavent aux beaux jours de baies, fraises des bois et champignons. Valentin Pajetnov y fonde une station biologique baptisée « Forêt pure ». Il souhaite pousser plus loin l’étude des ours et formaliser une méthode susceptible de rendre les orphelins à la vie sauvage. Le zoologiste s’abstient pour cela de toute caresse ou parole, les oursons ne devant même pas s’habituer à l’odeur de l’homme. Jusqu’au moment où, à l’âge de 18 mois, « les ours se séparent de leur mère, de moi en l’occurrence, et doivent subvenir seuls à leur subsistance ». La bête, alors en mesure de construire sa tanière sans apprentissage préalable, devient pleinement solitaire à l’âge de 2 ans.

Valentin Pajetnov préfère parler d’« estime particulière » pour les ours, plutôt que d’« amour » : « Si je les aimais, je ne pourrais pas leur inculquer la peur des hommes. Or c’est là notre but. L’ours est un animal très intelligent. Si je l’aime, lui aussi m’aimera, car l’amour est souvent réciproque ». En 1993, la soutenance d’une thèse de doctorat ès sciences biologiques couronne sur le plan académique la démarche de l’ancien ouvrier. Plus important, sa méthode a aujourd’hui fait école.

Jean-Pierre Thibaudat a consacré en 2000 un bel article à Valentin Pajetnov dans Libération. Deux livres du zoologiste ont été traduits en français par Yves Gauthier. Le premier est Avec les ours, paru chez Actes Sud en 1998. Le second est un livre autobiographique, publié en Russie en 2008, plusieurs fois réédité depuis et récompensé du prix russe Félix Stilmark « Nature et Littérature ». Le titre de sa traduction française est L’ours est mon maître, paru chez Transboréal en 2016. Une courte vidéo de Russia Beyond The Headlines (en russe) présente aussi le travail de Valentin Pajetnov.

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Sébastien

Sébastien, notre cher collègue est passionné de voyages et d’écriture, il contribue notamment à la communication de Nord Espaces.

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